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La mort subite du sportif du dimanche

La mort subite du sportif du dimanche

La mort subite du sportif du dimanche.

Introduction

La pratique d’une activité sportive régulière est unanimement recommandée, pour ses bénéfices cardiovasculaires en particulier. Cependant, et presque paradoxalement, l’activité sportive peut occasionnellement entraîner des complications cardiaques pouvant aller jusqu’à la mort subite. Certains auteurs vont jusqu’à parler d’un “paradoxe de l’exercice”. Au sein des morts subites en population, la mort subite survenant pendant une activité sportive bénéficie d’une attention médiatique et publique particulière. Ainsi, plusieurs cas d’athlètes de haut niveau ayant présenté un arrêt cardiaque pendant une activité sportive ont contribué à attirer l’attention sur ce phénomène et à instaurer une équivalence indue entre “mort subite pendant le sport” et “mort subite du jeune athlète de compétition”. Pourtant, alors que l’incidence de la mort subite survenant pendant une activité sportive de compétition est extrêmement faible – moins de 100 cas par an aux États-Unis –, la survenue d’une mort subite pendant une activité sportive récréative (“sportif du dimanche”) est nettement plus fréquente – de l’ordre de 4 200 cas par an aux États-Unis ou entre 800 et 1 000 cas par an en France.
Dr Éloi Marijon

 

UNE ÉTUDE À L’ÉCHELLE NATIONALE

Le Centre d’Expertise Mort Subite (CEMS) a initié un registre français en avril 2005, mené en population générale (60 départements, 35 millions d’habitants), qui a recueilli tous les cas de mort subite survenus pendant une activité sportive, pendant 5 années consécutives. Il s’agit d’une vaste étude collaborative entre le CEMS, l’Inserm, le Samu de France, l’Insep, la Société française de Cardiologie et la Fédération française de Cardiologie. L’objectif était de collecter un maximum de cas de morts subites au cours d’une activité sportive.
 

MÉTHODE EMPLOYÉE

Étant donné la difficulté d’atteindre l’exhaustivité des cas dans les 60 départements, nous avons mis en place dès le début un double système de détection : un formulaire papier classique que remplissaient les équipes du sur place, mais également une recherche automatique, via Internet, dans plus de 250 journaux locaux et régionaux. Ce dernier système permettait d’identifier les cas non spontanément transmis par les SAMU et, ainsi, de récupérer les informations médicales dans un second temps.
 

LES ENSEIGNEMENTS DE CETTE ÉTUDE

Dès lors, plusieurs enseignements ont pu être tirés et nous en retiendrons principalement dix.

Point 1
La mort subite du jeune athlète de compétition ne concerne pas plus de 6 % du total des morts subites du sportif (elle concernait pourtant près de 100 % des publications jusqu’à présent !) (Fig. 1).

Point 2
L’incidence de la mort subite pendant une activité sportive chez les jeunes athlètes (< 35 ans) de compétition est d’environ 10 par million et par an, soit quatre fois plus que chez les sportifs occasionnels du même âge.
Cependant, ces athlètes font environ 15 à 20 fois plus de sport que les seconds, suggérant effectivement que le risque cumulé du sportif de compétition est élevé, essentiellement du fait d’un “temps d’exposition” plus important. Le risque ajusté pour 1 h de sport pratiquée apparaît largement inférieur chez l’athlète, rejoignant l’idée que la pratique sportive régulière est bénéfique, diminuant à plus long terme la mortalité cardiovasculaire, incluant la mort subite. L’incidence chez le sportif d’âge moyen, faisant une activité sportive essentiellement de loisir, est d’environ 30-40 par million et par an.

Point 3
Le plus souvent, la cause de décès n’est pas identifiée (75 % des cas), en particulier dans la population pratiquant une activité sportive de loisir. Ce manque d’information est essentiellement lié au fait que deux tiers des sujets décèdent sur place et que l’autopsie n’est que très rarement pratiquée en France (< 5 %). Parmi les causes identifiées, la maladie coronaire reste prépondérante, représentant de 75 à 80 % des pathologies identifiées (avec une incidence de syndrome coronarien aigu plus élevée que celle retrouvée dans la mort subite non liée au sport, en accord avec les données anatomopathologiques du groupe de Renu Virmani), les cardiomyopathies familiales et les cardiopathies congénitales de 10 à 15 % et les canalopathies et fibrillation ventriculaire idiopathiques de 5 à 10 %.

Point 4
Au-delà des différences de participation sportive, le risque de mort subite de la femme pendant le sport apparaît extrêmement faible par rapport à celui de l’homme (jusqu’à 30 fois plus faible dans la tranche d’âge 45-54 ans). Dans plus de 80 % des cas, en effet, la mort subite du sportif concerne l’homme d’âge moyen (40-50 ans) et les femmes ne représentent que 5 % de l’ensemble des cas (Fig. 2).

Point 5
D’après ces données françaises, le risque de mort subite serait différent en fonction du sport pratiqué : il apparaît jusqu’à six fois plus faible chez l’homme effectuant une activité de natation comparée à celui effectuant du cyclisme. Afin de savoir dans quelle mesure ces différences sont directement liées au sport pratiqué ou en rapport avec d’éventuels facteurs confondants, d’autres études spécifiques sont nécessaires.

Point 6
...

 

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