Mythe ou réalité ? Un article du Dr Marc Ferrière, revue Cardio&Sport N°41.
La fréquence cardiaque (FC) d’un individu n’est pas stable, elle varie en permanence en fonction des besoins en O2 (besoins énergétiques) du corps. Cette régulation très fine dépend des branches parasympathique et sympathique du système nerveux autonome. La FC augmente avec la dépense énergétique. Par définition, la fréquence cardiaque maximale (FCmax) est celle que ne peut dépasser un sujet lors d’un effort maximal. Sur le plan physiologique, elle est déterminée par l’impossibilité d’augmenter ou de poursuivre un effort physique à une intensité programmée. Elle peut aussi être limitée par la survenue de signes de mauvaise tolérance des paramètres cardiaques fonctionnels. Pour simplifier, la FCmax correspond à la fréquence maximale à laquelle un coeur humain peut battre idéalement. La connaître permet au sportif d’avoir une efficacité maximale lors de son entraînement. Chez le cardiaque, la FCmax peut servir de marqueur d’efficacité, voire de sécurité.
Dr Marc Ferrière
INTRODUCTION
Le débit d’oxygène (VO2) – ou consommation d’oxygène – reflète la dépense énergétique de l’organisme. Le VO2 est le produit du débit cardiaque (DC) et de la différence artérioveineuse en oxygène. L’élévation du VO2 à l’effort dépend des adaptations de ces deux facteurs. Le DC augmente à l’effort grâce à une adaptation de ces deux facteurs de régulation, FC et volume d’éjection systolique (VES). Jusqu’au premier seuil ventilatoire, le DC augmente pour une large part par une hausse du VES qui plafonne à ce niveau car le temps raccourci de la diastole limite le remplissage ventriculaire. Puis, pour un exercice plus intense, c’est la FC qui majore le DC.
L’augmentation initiale de la FC jusqu’au premier seuil ventilatoire est essentiellement due à la diminution progressive du frein vagal. Au-delà, l’accélération de la FC est surtout due à l’augmentation de l’activité sympathique et à l’action des catécholamines circulantes. Lors d’un effort, la tachycardie est synonyme de raccourcissement du cycle cardiaque. Ce raccourcissement se fait plus aux dépens de la diastole que de la systole. À la FCmax, le temps de diastole très court limite en plus le remplissage coronaire. Le myocarde est donc confronté à une augmentation de son travail cardiaque avec une hausse de ses besoins en O2 et une difficulté d’adaptation des apports en O2. Chez un sujet sain à l’exercice, la balance besoins-apport en O2 reste équilibrée malgré la diminution de la durée de la diastole. Mais, lorsqu’il existe une pathologie cardiaque
un déséquilibre en O2 apparaît. Au VO2max, la FCmax est classiquement atteinte et sa variation est alors faible (< 2-3 bpm) car les limites de régulation du système nerveux autonome sont atteintes. Sa connaissance pour un sujet donné est donc d’importance et sa détermination doit être aussi précise que possible.
La fréquence cardiaque maximale, une individualité au-delà des formules
La FC de repos, et en particulier la bradycardie de repos d’un sujet sportif ou non, ne préjuge en rien de sa FCmax (1). La FCmax diminue de manière certaine avec l’âge (moins bonne réponse du noeud sinusal aux stimuli catécholergiques). De très nombreuses formules (ce qui veut dire qu’aucune n’est parfaite) sont proposées pour estimer la FCmax théorique (Tab. 1). La formule la plus populaire et la plus utilisée dans les milieux médical et extramédical, 220 - âge ± 10 bpm (Astrand, 1954), a le mérite de la simplicité. Elle peut continuer à être utilisée, mais comme un repère, en connaissant ses limites, et non comme un dogme. Elle est extraite d’études réalisées chez des sujets non ou peu entraînés qui ont fait leur effort sur cycloergomètre. Or, d’une part, sur vélo, les sujets peu entraînés arrêtent l’effort à cause de leurs limites musculaires et, d’autre part, pour un sujet donné, sa FCmax en course à pied sera supérieure à celle observée sur vélo (en moyenne 10 bpm). Les cyclistes très entraînés sont pratiquement les seuls à présenter la même FCmax sur les deux ergomètres.